Il est de bon ton, à l’approche de la fin de l’année, de dresser des listes des meilleurs livres, des films préférés, des personnalités qui ont marqué l’année. J’y vais aujourd’hui avec ma liste des dix leçons de 2020, cette année si particulière qui a mis à rude épreuve notre capacité d’adaptation!
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Leçon n°1: savourer la résilience du fait urbain. Au début de la crise sanitaire, on a beaucoup cassé du sucre sur le dos de la ville. Les détracteurs de la densité, notamment, ont été prompts à lui faire porter la responsabilité des foyers pandémiques. Quelques mois plus tard, force est de constater que le virus ne se propage pas vraiment plus vite en zone dense, que nous avons toujours autant besoin de la fabrique de collectif qu’est la ville, et que l’économie de Montréal, par exemple, se porte plutôt bien.
Leçon n°2: soigner nos espaces publics de proximité. Faute de soupers entre amis, d’art et de divertissement accessibles, aller prendre une marche dans la rue est devenu une des seules façons de se détendre et de se sentir faire partie d’une communauté. Nous avons alors pu mesurer l’importance d’avoir des rues, des parcs et des espaces publics bien aménagés, avec des bancs, des arbres, de larges trottoirs… Cela doit devenir la norme, dans toutes nos collectivités!
Leçon n°3: fournir à chacun un logement adéquat. Le confinement a mis en évidence les inégalités en matière d’habitat, entre ceux qui manquaient de tout et ceux à qui la flambée des prix de l’immobilier a permis de faire de jolies plus-values. Au Québec, un ménage sur dix a des besoins impérieux en matière de logement. Un logement de qualité, adapté aux besoins, cela ne devrait pourtant pas être un privilège.
Leçon n°4: se nourrir près de chez soi. S’il y a un virage que nombreux ont souhaité prendre avec la pandémie, c’est celui de l’achat local, particulièrement alimentaire. On ne compte plus les nouveaux projets visant à favoriser l’autonomie alimentaire. Une intention inspirante et qui pourrait générer de nombreux systèmes alimentaires de proximité, à condition de parvenir à mieux protéger le territoire agricole, premier ingrédient pour des villes et des régions nourricières.
Leçon n°5: s’adapter ou ne pas s’adapter au télétravail. Le télétravail affecte nos relations professionnelles, la vitalité de nos centres-villes et parfois notre santé mentale, mais y avoir accès peut être un gros plus en matière de qualité de vie. Il est difficile de prédire la persistance de son effet sur nos collectivités, mais c’est un dossier à surveiller!
Leçon n°6: prendre garde au bulldozer de l’achat en ligne. La concurrence du commerce d’entrepôt commençait déjà à se faire sentir sur le commerce de proximité, mais la pandémie lui a fourni une formidable piste d’accélération. Pour dompter le monstre, il faudra soutenir les commerces de nos rues principales et les aider à prendre le virage numérique. Il faudra aussi établir l’équité entre les types de commerces, notamment sur le plan fiscal.
Leçon n°7: cesser le procès fait au transport collectif. Oui, il faut idéalement se tenir à distance les uns des autres, et porter un masque. Non, le transport collectif n’a pas été le lieu de contamination que l’on redoutait. Pourtant, il est souvent pointé du doigt dans les capsules d’avertissement sur les risques de la COVID, au risque de renforcer les craintes à son endroit. Le transport collectif est, lui aussi, un service essentiel à la viabilité de nos collectivités.
Leçon n°8: planifier des milieux de vie pour toute la vie. Le lourd tribut payé à la pandémie par les personnes âgées est notamment lié au type d’habitat dans lequel beaucoup d’entre nous terminons notre vie. Il nous porte à réfléchir à la façon de construire des collectivités qui répondent mieux aux besoins du grand âge. Rappelons-nous que nous allons tous vieillir (si tout va bien).
Leçon n°9: prendre soin de nos cœurs de collectivités. Les centres-villes, les rues principales et les noyaux villageois ont été fortement affectés par la pandémie. Mais celle-ci a aussi mis en lumière l’attachement que leur porte la population québécoise. Dans les cœurs historiques, la pandémie n’a pas ralenti la dégradation du patrimoine, notamment bâti, mais de plus en plus d’initiatives locales s’emploient à inverser la tendance. La sauvegarde et la dynamisation de nos cœurs de collectivités doivent être au cœur de la relance post-pandémique.
Leçon n°10: oser agir vite, quitte à bousculer. Dans les derniers mois, il a fallu agir vite pour donner plus d’espace et de sécurité aux piétons, pour créer des terrasses en pleine rue, pour mettre en place des solutions de livraison et autres innovations rendues nécessaires par la pandémie. Inventer, tester, s’ajuster, c’est le sens du travail des urbanistes, ingénieurs et autres concepteurs des milieux de vie. Bravo à toutes les grandes et petites villes qui ont su bousculer leur agenda pour mieux répondre aux besoins de tous!
Leçon en bonus: compter les uns sur les autres. Le difficile bilan du Québec quant aux décès et aux cas de COVID ne doit pas faire oublier à quel point nous avons réagi à la pandémie comme une collectivité soudée et solidaire. Ce printemps, nous avons réduit nos déplacements à presque rien dans le but collectif d’aplanir la courbe. La réponse aux appels aux volontaires, dans les CHSLD par exemple, a aussi dépassé les attentes. Cette bienveillance peut être une clé de notre résilience.
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Sur ces réflexions qui m’auront permis de revisiter presque toutes mes chroniques de l’année, je vous souhaite de très joyeuses fêtes! Prenons du recul, reprenons des forces, et à bientôt pour une nouvelle année de défis pour nos collectivités.
Crédit photo: Manny Fortin