- Le Devoir, 2 juin 2020
Les tristes effets de la pandémie actuelle sur les personnes âgées demeurant dans des établissements collectifs (CHSLD, résidences pour personnes âgées…) ou à domicile témoignent de notre échec de répondre collectivement à leurs besoins et aspirations. La pandémie est en outre révélatrice des inégalités au sein de la population et elle a contribué à l’isolement des aînés.
De plus en plus de Québécois font partie du groupe très diversifié des aînés. Au fait, à partir de quand sommes-nous « aînés »? Qu’est-ce que ça implique de vieillir dans notre milieu de vie? En revanche, qu’est-ce que ça implique de ne pas pouvoir le faire?
Planifier nos milieux de vie
Y réfléchir collectivement nous permet de planifier nos milieux de vie en conséquence, avec toutes les nuances que cela implique. Une chose est certaine, il est grand temps de valoriser les contributions des personnes plus avancées en âge et de créer des milieux de vie qui répondent à leurs besoins tout en les impliquant dans la recherche de solutions.
Il faut aussi renforcer les capacités des municipalités, en les sensibilisant à la diversité au sein des personnes âgées, en les aiguillant sur les enjeux spécifiques à la population vieillissante et les stratégies pour y répondre, sans oublier le financement adéquat pour y arriver. Pour créer des milieux de vie accueillants pour les personnes âgées, quatre domaines nous apparaissent particulièrement importants:
- le maintien et l’amélioration de l’accès aux services de proximité;
- l’amélioration de la sécurité et du confort lors de déplacements;
- la création d’espaces publics conviviaux et inclusifs;
- le besoin de diversification de l’offre résidentielle destinée aux aînés.
L’habitation, un élément clé
À l’égard de l’habitation, la vision de Vivre en Ville est sans équivoque : une seule forme résidentielle ne peut convenir à tous les aînés, avec des conditions de vie et de santé aussi variées. Sans compter que les besoins des personnes aînées évoluent à travers les années, parfois lentement et parfois très rapidement, suite à une chute par exemple. De plus, en tant qu’aménagistes, il est important de prévoir les effets de cohorte et de penser dès la table à dessin à la flexibilité des espaces résidentiels au fil du temps, des générations et des clientèles.
Pensons par exemple aux réalités qu’imposent les impairs de mobilités d’une personne seule, âgée ou non, qui peuvent très bien rejoindre les besoins d’une jeune famille devant composer avec une poussette durant quelques années. Dans les deux cas, l'accessibilité universelle du foyer est essentielle. Aussi, lorsqu’un ménage se reconfigure ou évolue au cours des étapes de vie, comme lors du départ des enfants du foyer familial, des espaces de vie peuvent devenir superflus ou même un poids pour les aînés qui doivent les entretenir. La flexibilité et la diversité des logements favorisent en plus la cohabitation des générations (au sein d’une même famille, ou non) et l’entraide entre voisins.
Ainsi, une offre de logements adaptables et diversifiés permet de convenir aux besoins d’une grande partie de la population, pour une plus grande période. Et bonne nouvelle : ces formules résidentielles sont aussi plus accessibles aux petites municipalités qui cherchent à contrer l’exode des personnes vieillissantes vers les résidences pour aînés souvent localisées dans les grands centres régionaux. Par ailleurs, le désir de vieillir « chez soi » est très présent chez bien des gens, alors à défaut de vieillir dans son propre logement, il serait possible de maintenir les repères et liens sociaux tissés dans sa localité.
La localisation de l’habitat est cruciale, puisqu’elle incite ses résidants à s’impliquer et s’ancrer dans leurs milieux, facteur de résilience essentiel en temps de crise. À l’échelle de la municipalité, il est possible de restreindre des nouvelles habitations aux zones favorables au vieillissement. On s’attardera alors :
- à la présence et l’accessibilité aux destinations quotidiennes (p. ex. commerces, services de tout ordre);
- une trame urbaine et des infrastructures favorables à la marche sécuritaire (p. ex. réseau de rues perméable, présences de trottoirs);
- des parcs et espaces publics accessibles en toute saison, disposant d’infrastructures de repos (bancs);
- lorsque possible, une desserte adéquate en transport collectif (métro, autobus, taxi, covoiturage) et/ou inter-régional (autocar, train).
Enfin, l’abordabilité du logement est un élément important pour faire en sorte que l’accès à ces milieux de vie soit équitable, d’où l’importance de se doter de programmes de financement adaptés.
Vivre en Ville est heureuse de pouvoir contribuer à ce défi collectif en collaboration avec les aînés, les municipalités et leurs partenaires. Cliquez ici pour en savoir plus sur le projet.
Au courant des prochaines semaines, nous vous proposons quelques réflexions concernant l’adaptation des municipalités au vieillissement de la population. Notre prochain billet abordera le partage équipements pour enfants, aînés et autres publics pour prévoir les effets de cohorte.