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Transport collectif et aménagement urbain: le paradoxe du gouvernement Legault

Par: Samuel Pagé-Plouffe
05 avril 2022

Le gouvernement Legault s’est mis les pieds dans les plats dans les dernières semaines en s’immisçant dans le projet de tramway de Québec. Le monde municipal et les groupes environnementaux ont vigoureusement dénoncé l’intrusion gouvernementale, alors que des gens d’affaires ont appelé à aller de l’avant sans tarder. 

Pour quiconque observe les grands projets de transport collectif structurant à l’international, le prétexte de la tergiversation frise l’absurde. Reconfigurer une artère comme le boulevard René-Lévesque pour y favoriser une cohabitation plus conviviale et sécuritaire entre piétons, cyclistes et automobilistes fait partie des facteurs de succès et d’attractivité d’un réseau structurant de transport collectif. Le scénario privilégié par la Ville de Québec permet aussi de protéger plus d'arbres, en pleine cohérence avec les investissements en verdissement urbain récemment annoncés par le ministre de l’Environnement.

Rappelons une évidence: l’ajout d’un service de transport collectif lourd permet de déplacer nettement plus de personnes. Il s’agit d’une utilisation plus efficace de l’espace. 

En matière de transport collectif et d’aménagement urbain, le gouvernement Legault est devant un paradoxe. Ayant très peu d’engagements forts en environnement à son arrivée au pouvoir, il a décidé (avec raison à notre avis!) de miser sur plusieurs projets de transport collectif structurant, notamment dans le grand Montréal, à Gatineau et évidemment dans la capitale. Or, l’espace étant limité, le succès de tels projets passe très souvent par un meilleur partage des voies existantes entre utilisateurs. 

PHOTO : GRACIEUSETÉ : VILLE DE QUÉBEC

Le transport collectif comme solution à l’étalement urbain

Comme l’a déjà affirmé François Legault, orienter le développement urbain à proximité des services de transports collectifs est une des meilleures manières de lutter contre l’étalement urbain. 

L’étalement urbain constitue une des principales causes de dégradation de l’environnement et de la biodiversité au Québec, en plus de constituer un gouffre financier. Y mettre fin doit constituer une priorité nationale et ce ne sera possible qu’en construisant des milieux de vie moins dépendants à l’automobile. 

Nous constatons que les mairesses et maires d’un peu partout au  Québec sont de plus en plus nombreux à vouloir mettre fin à l’étalement urbain. Un grand nombre  prône la construction de logements à l’intérieur des périmètres urbains pour protéger les milieux naturels et le territoire agricole. C’est franchement enthousiasmant. Ils savent très bien qu’un développement immobilier plus compact, axé sur les transports actifs et collectifs est au cœur de la solution. 

De l’importance de règles communes en aménagement du territoire

N’empêche, le gouvernement du Québec a un rôle crucial à jouer pour transformer le modèle de développement urbain et l’arrimer à la  mobilité durable. C’est par exemple au ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH) qu’on détermine si l’agrandissement des périmètres de développement est conforme aux orientations gouvernementales (OGAT). C’est aussi ce ministère qui travaille à la révision du cadre d’aménagement du territoire. 

Il y a plus de 1100 municipalités au Québec. Il y aura toujours de moins bons élèves. Pour prendre un virage vers un développement plus viable en mettant fin à l’étalement et en favorisant la mobilité durable, le milieu municipal a besoin que le gouvernement du Québec établisse des règles communes et équitables. Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls à le réclamer comme le rappelle la sortie de 10 maires et mairesses en septembre dernier

Dans le dossier des inondations, par exemple, le MAMH a fait preuve de leadership après le deuxième épisode catastrophique de crues printanières en trois ans. On a changé des façons de faire coûteuses et archaïques parce que c’était nécessaire.

Sortir du paradoxe et agir avec cohérence 

Nous le répétons, ce n’est certainement pas le rôle du gouvernement d’intervenir sur chaque coin de rue. Ni de diminuer le niveau d’ambition des projets. Le monde municipal a bien fait de défendre la compétence de la Ville de Québec. Reste que le gouvernement a un rôle à jouer. 

Pour réussir son ambition de réaliser des projets de transports collectifs structurants, à Québec comme ailleurs, le gouvernement doit sortir du paradoxe et agir avec cohérence. Il doit entre autres soutenir la planification territoriale innovante, financer et faciliter la construction de logements abordables à proximité des stations et localiser les bâtiments de l’État près des autres services. 

Espérons que la CAQ tirera des leçons de la controverse qu’elle a elle-même créée. 

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