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Les dossiers qui marqueront la première moitié de 2023

Par: Samuel Pagé-Plouffe
12 janvier 2023

Chronique

On entend souvent que six mois en politique, c’est une éternité. Chaque année vient avec son lot d’imprévus, qui bouleversent l’agenda et qui peuvent redéfinir le cours des choses. Qui aurait pu prédire qu’en juin, la mairesse Valérie Plante annoncerait (lors du Rendez-vous Collectivités viables!) que la COP15 sur la biodiversité qui devait avoir lieu en Chine se tiendrait plutôt à Montréal. Le milieu environnemental québécois s’est mobilisé à une vitesse record, et la protection de la nature s’est mérité une attention inédite dans l’espace public en décembre dernier! 

Voilà pourquoi je m’en tiens aux dossiers qui marqueront à nos yeux la première moitié de 2023. 

Sécurité routière 

Un événement qui aura certainement marqué les esprits en 2022 est le décès de la jeune Maria, frappée par une automobile alors qu’elle se rendait à l’école. Depuis, la mobilisation est en crescendo. « Ça ne doit plus se reproduire », déclaraient mardi les citoyens du quartier qui se sont réunis pour réclamer des mesures d’apaisement de la circulation. Puis, hier, plus d’une dizaine d’organisations, représentants de tous les usagers de la routes et des personnes vulnérables, se sont mobilisés afin de réclamer une stratégie gouvernementale de sécurité routière basée sur l’approche vision zéro, grâce au leadership de Piétons Québec. Une rencontre aura lieu ce vendredi avec les conseillers de la ministre Geneviève Guilbault.

L’adoption d’une telle stratégie gouvernementale est d’ailleurs prévue dans la Politique de mobilité durable du gouvernement du Québec. L’attente a assez duré, il faut agir dès maintenant.  

SOS transport collectif 

Bien que le sous-financement des transports collectifs soit un problème qui nous mobilise depuis toujours, le début de 2023 sera particulièrement névralgique. Les effets de la pandémie se font encore sentir dans les budgets des sociétés de transports, en particulier dans le grand Montréal et à Québec. La décision de la STM de mettre fin à ses lignes « 10 minutes max » a tiré la sonnette d’alarme: nous sommes aux portes d’une spirale négative.

Le précédent ministre des Transports, François Bonnardel, s’était pourtant engagé à tout mettre en œuvre pour éviter les coupures de service. Une entente de cinq ans avec le milieu municipal est d'ailleurs prévue afin d’assurer une prévisibilité au financement des transports collectifs et de permettre son développement partout au Québec. Mais cette entente ne règlera pas tout, loin de là. Les problèmes de financement sont structurels, et Vivre en Ville, avec ses partenaires de l’Alliance TRANSIT, proposeront des solutions dès les premiers mois de l’année. 

À une époque pas si lointaine, on a malheureusement démantelé des trains et tramways, entamant une longue phase de déclin du transport en commun. Mais depuis une quinzaine d’années, sa fréquentation était en croissance presque partout, au point d’atteindre des records d’achalandage en 2019. Quels legs voulons-nous laisser à la prochaine génération, dans toutes les régions du Québec? Plus de transport en commun, ou moins?  

Transition énergétique dans les bâtiments 

Depuis peu, Vivre en Ville travaille à la décarbonation des bâtiments, notamment dans le cadre du Plan climat de la Ville de Montréal. À la fin de 2022, cinq municipalités ont annoncé leur intention d’emboîter le pas à la métropole afin de sortir le gaz naturel des bâtiments, en particulier pour les constructions neuves d'ici 2025. Celles-ci s’appuyaient notamment sur le rapport du Centre québécois du droit de l’environnement, élaboré en partenariat avec Vivre en Ville. 

Dans les prochains mois, nous collaborerons avec des partenaires du milieu environnemental afin de convaincre d’autres municipalités d’agir en ce sens et de bonifier la politique énergétique du Québec dans une perspective de la carboneutralité. 

(Encore) le 3e lien et la capacité routière 

Le premier ministre Legault a promis de rendre publiques des « études » sur le 3e lien dès le début de l’année. Dans ce dossier ultra-politique, qui fait l’objet d’un engagement de près de 10 milliards $ sans données à l’appui, la crédibilité du gouvernement est à son plus bas. La coalition Non au troisième lien sera à l’affût pour mettre en lumière les nouvelles pirouettes qui tenteraient de justifier le projet. Le gouvernement prétend d’ailleurs vouloir agir pour éviter que ce projet ne cause de l’étalement. Il faudrait expliquer comment. 

Dans Lanaudière, le projet de prolongement de l’Autoroute 25 sème également l’inquiétude. Une mobilisation citoyenne est en cours, et le projet est fortement ralenti en raison de la présence d’espèces menacées dans le tracé prévu. Nous l’avons répété à de nombreuses reprises pendant la COP15: l’étalement est un fléau pour la biodiversité

Biodiversité 

Le Québec a plutôt bien paru sur la scène internationale lors de la COP15, et l’entente convenue en décembre à Montréal est qualifiée d’historique. Ce n’est certainement pas parfait ni même suffisant, mais on peut néanmoins se réjouir des avancées. Ceci dit, si la protection de 30% du territoire est certainement un objectif louable, il faut aussi agir sur le 70% qui reste, en particulier dans le sud du Québec. 

C’est grâce à la planification territoriale qu’on parviendra, notamment, à bonifier la connectivité écologique tout en freinant l'artificialisation des sols. Des annonces en ce sens se font toujours attendre. C’est aussi grâce à la planification qu’on adaptera nos milieux de vie aux nouveaux aléas climatiques.

Des actions rigoureuses en aménagement du territoire

Bien que la vision présentée par la ministre Andrée Laforest à la fin du printemps dernier ait reçu un accueil assez favorable, les actions concrètes se font toujours attendre en matière d’aménagement du territoire. Or, ça ne pourra pas toujours ne pas arriver, et le gouvernement s’est fermement engagé à adopter un plan de mise en œuvre d’ici la fin de l’hiver 2022.  

Les réformes législatives devront suivre rapidement, de même que la modernisation des orientations gouvernementales en matière d’aménagement du territoire. Des investissements importants seront également nécessaires pour que le changement de cap se fasse sentir rapidement. L’exemplarité de l’État, par exemple dans la localisation des bâtiments publics, doit également s’observer dès maintenant. Le dossier du futur hôpital de Gatineau aura créé un fort précédent.  

Parmi les défis: tout mettre en œuvre pour développer l’offre de logement à proximité des services. Il est tout à fait possible construire des nouvelles unités d’habitation, à un rythme beaucoup plus élevé qu'actuellement, en permettant de développer l’offre là où la demande est élevée. Il faut changer d'approche et oser s’inspirer des juridictions avant-gardistes. Pensons notamment à la Nouvelle-Zélande. 

Du côté des municipalités, avec qui Vivre en Ville travaille étroitement, il est clair que le changement de culture est bel et bien entamé. Des maires et mairesses prennent la parole comme jamais auparavant pour appeler à un changement en profondeur. 

D’ailleurs, un panel sur la Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire aura justement lieu aujourd'hui lors de notre assemblée générale annuelle, en compagnie de Maxime Pedneaud-Jobin, ancien maire de Gatineau, d'Isabelle Boucher, directrice générale de l'urbanisme et de l'aménagement du territoire au ministère des Affaires municipales, de Jeanne Robin, porte-parole de l’alliance ARIANE (et directrice principale de Vivre en Ville) et d'Alexandre Turgeon, directeur général du Conseil régional de l’environnement - région de la Capitale-Nationale.

Voilà donc un petit aperçu de quelques dossiers prioritaires pour Vivre en Ville en ce début d’année. Bien d’autres auraient pu être mentionnés, par exemple sur les suites à donner au Forum sur les systèmes alimentaires territoriaux, sur le Registre des loyers largement réclamé, et sur de nombreux dossiers locaux. Nous y reviendrons!

Et surtout, je vous souhaite, à toutes et à tous, une bonne année 2023!

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