En 2018, Vivre en Ville entend entamer un travail en profondeur sur un aspect majeur du développement durable de nos collectivités : la question de l’offre commerciale. Ce n’est certes pas la première fois que notre équipe se penche sur le sujet, ayant notamment abordé la question globale de la localisation des activités ou celle, plus spécifique, de l’accès à une saine alimentation. Nous avons aussi développé un partenariat avec Rues principales, qui a pour mission de dynamiser les cœurs de collectivités. Il nous apparaît cependant urgent d’y concentrer cette année des efforts supplémentaires, puisque nous observons que c’est un domaine où le virage peine à s’opérer.
Dans plusieurs domaines du développement urbain, on voit des progrès, au moins dans les changements d’intentions et d’orientations. Nous sommes d’ailleurs fiers d’avoir contribué au changement et de poursuivre notre action en faveur de la mobilité durable, de l’habitat dense à échelle humaine, de la protection des milieux naturels et de la densification verte. Nous constatons avec joie les efforts portés par les décideurs et les professionnels, tant publics que privés.
En ce qui concerne la prise en compte, dans l’organisation du tissu commercial, des préoccupations et des enjeux actuels, on est en revanche encore très loin du compte. Que ce soit dans les grandes villes ou dans les plus petites communautés, c’est toujours la tentation de céder au plus gros qui oriente le résultat. Ce « plus gros », supposément « moins cher », qui contribuera à vider le village ou la rue commerciale de ses clients et de ses commerces, suscitera des trajets plus longs et exigera, à terme, un ou deux élargissements autoroutiers, en plus d’imposer son coût environnemental et social élevés.
Paradoxalement, chacun comprend l’importance d’avoir, par exemple, une épicerie accessible, aussi bien pour éviter de longs déplacements – coûteux en temps et en énergie – que pour que les moins mobiles aient accès à des fruits et des légumes frais. Mais personne ne semble prêt à faire ce qu’il faut pour ramener l’offre commerciale à des formes compatibles avec une localisation plus près des milieux de vie. Au contraire, au prétexte de développement économique ou de lutte contre des « fuites commerciales », nous assistons à une véritable course à qui ouvrira le plus de terrains périphériques à l’appétit des développeurs.
Alors que nous tentons de mieux bâtir nos villes, nos villages et nos quartiers, la dispersion du tissu commercial contribue à détruire leur cohérence. Il est urgent de nous réveiller avant qu’il soit trop tard. Nos cousins français déplorent déjà la désertification commerciale de leurs centres-villes, tandis que nos voisins américains sont aux prises avec nombre de strips commerciales déclinantes et de power centers en voie d’abandon. Il nous appartient de travailler ensemble, commerçants, développeurs et urbanistes, pour que le tissu commercial du Québec assure sa résilience et sa prospérité, au bénéfice de tous.
Pour y réfléchir, Vivre en Ville consacrera la troisième édition des Rendez-vous Collectivités viables, le 10 mai 2018 à Montréal, à la question de la réconciliation entre commerce et développement urbain durable. Nous espérons vous y voir nombreux!