Mieux construire nos bâtiments, nos rues, nos quartiers, nos agglomérations

351 contre 44

Par: Christian Savard
13 février 2018

Nous sommes nombreux à angoisser au moment de prendre l’avion. Pourtant, les chiffres sont clairs : il est beaucoup, beaucoup plus sécuritaire de prendre les airs que de s’aventurer dans nos rues et sur nos routes. En 2017, dans le monde entier, on a eu à déplorer 44 décès sur l’ensemble des liaisons aériennes commerciales. En 2016, dernier bilan routier disponible pour le Québec, ce sont 351 personnes qui ont été tuées sur la route. Beaucoup de ces morts du quotidien, qui ne font pas toujours la manchette, sont pourtant évitables.

Le Québec révise actuellement son Code de la sécurité routière (CSR), et plusieurs propositions devraient notamment améliorer la situation des usagers vulnérables. Il apparaît toutefois nécessaire d’aller beaucoup plus loin. Le CSR agit sur les comportements; or, bien souvent, c’est l’environnement qui tue, pas la délinquance seule. Vivre en Ville appelle à l’adoption, au Québec, d’une approche de la sécurité routière basée sur les principes de la Vision Zéro.

Mise en œuvre dans divers pays, dont la Suède qui en est la pionnière depuis 20 ans, la Vision Zéro met de l’avant le droit à la sécurité routière et veut, à terme, parvenir à éviter tout décès ou blessure grave sur le réseau routier. La Vision Zéro assume que l’erreur est humaine – il nous arrive à tous d’être distraits ou maladroits – et qu’elle ne doit pas conduire à la mort. La Vision Zéro prend acte de la vulnérabilité du corps humain, incapable, par exemple, de résister sans protection au choc d’un véhicule roulant à plus de 50 km/heure. Sur cette base, la Vision Zéro propose un changement de paradigme vers une « rue qui pardonne », soit des aménagements conçus pour assurer une réduction de la vitesse et la protection des usagers les plus vulnérables.

Adopter une Vision Zéro au Québec, c’est rendre l’accès à la rue à ceux qui souffrent actuellement le plus de l’inégal rapport de force avec des véhicules de plus en plus gros et de plus en plus nombreux : les piétons et les cyclistes. Si le bilan routier québécois s’améliore depuis 10 ans, la situation est néanmoins préoccupante pour les piétons, qui ont vu leur bilan passer de 45 à 63 décès entre 2015 et 2016. Remettre nos rues à l’échelle du piéton est un moyen concret d’assumer nos responsabilités envers nos aînés – plus de la moitié des piétons tués – et nos jeunes, qui ne sont plus que 30% à marcher vers l’école, notamment parce que leurs parents craignent pour leur sécurité. La Vision Zéro permet également de protéger les automobilistes, en ville comme dans nos campagnes.

Nous attendons de l’aviation une sécurité sans faille, et nous sommes prêts pour cela à accepter toutes les mesures de sécurité nécessaires. Pourquoi continuerions-nous de tolérer un réseau de rues et de routes qui s’en remet à la vigilance de chacun pour assurer la sécurité de tous?

Des villes et des villages apaisés par la Vision Zéro protègeront comme la prunelle de leurs yeux tous les citoyens qui se meuvent dans nos collectivités. Gardons à l’esprit que c’est le mouvement qui crée la possibilité de richesses, qu’elles soient pécuniaires, culturelles ou sociales. Que certains risquent de payer de leur vie l’audace de continuer à se déplacer n’est pas acceptable. Dans la majorité des cas, la solution est une meilleure conception des réseaux de transport routier.

La Vision Zéro est un virage à prendre et un défi stimulant à lancer aux ingénieurs, urbanistes et autres concepteurs de nos milieux de vie. Pour qu’ils restent des milieux de vie, pour chacun d’entre nous.

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